stat

Ok

En poursuivant votre navigation sur ce site, vous acceptez l'utilisation de cookies. Ces derniers assurent le bon fonctionnement de nos services. En savoir plus.

- Page 2

  • « 40 rue Zitna, Prague », le roman "fin et intelligent" de Simone STRITMATTER. Au catalogue des éditions Jérôme Do Bentzinger

    cad7e6a243781f73dd1b576742c05023.jpg

    http://www.wukali.com/40-rue-Zitna-Prague-un-beau-titre-de-roman-2075#.VXVwTuukIgt

    Un roman, 40 rue Zitna, Pague, une maison d’édition Jérôme Do Bentzinger qui entre dans la cour des grands. Trente six courts chapitres, faciles et rapides à lire, un roman de  Simone Stritmatter.

    Anna travaille dans un laboratoire biologique spécialisé dans la génétique dirigé par Monsieur Sthul, un parfait pervers narcissique dont la principale victime est son épouse Elzbieta, une orpheline praguoise en mal d’amour et de reconnaissance mais surtout bien plus intelligente et brillante que lui. Quand il part en Californie, Anna et Elzbieta vont se rapprocher, cette dernière va développer une forte amitié avec un nouvel employé d’origine japonaise Long Long. Un jour, Anna va porter secours à sa voisine Ivanka qui va se révéler être une amie d’orphelinat d’ Elzbieta. Mais elle disparaît et les deux jeunes femmes vont essayer de la retrouver jusqu’à son dernier domicile identifié au 40 rue Zitna à Prague. Cette quête, ces amitiés vont permettre à Elzbieta de sortir de l’emprise de son mari.

    Alors, c’est maintenant que le chroniqueur doit émettre son avis, et face à ce court roman, j’ai beaucoup de mal à le faire tant je suis partagé et parfois même sur les mêmes effets. Ainsi, Simone Stritmatter apprécie le cinéma et souvent une situation lui fait penser à une scène d’un classique du cinématographe. Soit, ce n’est pas déplaisant et toujours fait avec finesse et intelligence. On aime ou pas mais c’est très respectable car elle n’abuse pas. En revanche, je suis nettement plus sceptique quant aux digressions qu’elle opère pour donner des définitions comme l’ADN, la manipulation morale, la vie de Sainte Paulette ou l’activité du Mansa club dont elle nous livre l’adresse (…).

    L’auteur est parfois, comment dire, un peu rapide : l’héroïne se retrouve à l’hôpital quand elle porte secours à Ivanka sans que l’on comprenne exactement comment, il m’a fallu du temps pour comprendre qu’elle n’avait pas été agressée. Tout comme des personnages secondaires comme James et dans une moindre mesure Ivanka ou Long Long, sont à peine ébauchés et il est difficile de comprendre leurs motivations, leurs caractères et donc d’entrer en empathie avec eux.

    Mais j’ai bien apprécié la façon dont elle aborde la personnalité du pervers narcissique, il n’y a aucune violence, que des actes, des petits faits qu’il faut savoir déchiffrer pour comprendre le mal que de tels personnes peuvent faire. Elzbieta ne se fait pas tabasser physiquement régulièrement, mais son époux par ses gestes, ses paroles, ses écrits, ses silences, la plonge régulièrement dans ses tourments et la domine totalement. C’est bien plus vicieux que la violence, moins visible, mais sûrement bien plus dangereux pour la victime. Elzbieta finit par sortir de son emprise et peux enfin s’exprimer, créer, non dans le domaine scientifique mais dans le cinéma. (…)

    Alors, que penser de ce livre ? (…) Il y a de belles idées, une approche originale des pervers narcissiques, je ne doute pas qu’à force d’écrire Simone Stritmatter va gommer ses petites erreurs et progresser en littérature.

    Émile Cougut

    40 rue Zitna, Prague
    Simone Stritmatter

    Jérôme Do Bentzinger éditeur. 20€

  • "Un petit ouvrage débordant de tendresse et d’optimisme" par Émile Cougut sur "Le Plan de Lucien" de Rachel GUICHARD

    Egotism as a social defense medium

    http://www.wukali.com/Le-plan-de-Lucien-un-roman-de-Rachel-Guichard-2081#.VXVvf-ukIgs

    Capture d’écran 2015-06-08 à 12.35.20.pngVoici un court roman, Le plan de Lucien, somme toute assez original, dénonçant les ravages pour soi et pour les autres que peut engendrer l’isolement par rapport aux autres, l’égotisme le plus « pur », si proche de l’autisme. Mais l’autisme est une maladie, l’égotisme n’est qu’une façon d’être, de penser, de se comporter.

    Deux personnages dans ce livre de Rachel Guichard sont de purs égotistes : Lucien, petit garçon de 6 ans, orphelin de mère, élevé par son musicien de père et sa grand-mère et Sam, le psychiatre qui vient de perdre, de par son attitude, Sarah la femme qu’il aime et dont il était aimé. Seule une prise de conscience des ravages que leurs attitudes causent leur permettra de s’ouvrir à leurs entourages. Prise de conscience qui se fait au contact de l’un avec l’autre. Les fantômes qui les torturent les empêchent de s’impliquer totalement, de faire le don gratuit de soi à l’autre, aux autres. Ils ont peur de l’engagement et ne perçoivent l’amour non par les joies et le bonheur qu’il peut apporter mais par les souffrances qu’il peut potentiellement engendrer.

    Le plan de Lucien, petit garçon précoce, brillant est de ne plus parler, de n’écouter que ce qui l’intéresse pour ne pas être parasité par des informations qu’il juge inutiles. Certain de l’amour de son père et de sa grand-mère, il ne veut avoir qu’une relation basée sur l’essentiel, c’est à dire sur ce qui lui apporte directement quelque chose, sans penser aux conséquences que son attitude peut avoir sur eux. Et quand il vivait avec Sarah, Sam avait exactement la même attitude sauf que lui parlait.

    Il ne faut pas croire, penser, semble dire l’auteur, que les paroles ne sont utiles que si elles ne sont utilisées que pour communiquer au profit que d’un seul et non à créer un lien même futile entre l’émetteur et le récepteur. De plus quand il n’y a qu’un émetteur sans que le récepteur émette en retour, même l’amour le plus fort, le plus sincère ne peut survivre à cette absence de relation réciproque.

    J’ai bien aimé le style de Rachel Guichard qui sait très bien… en changer. Quand se sont les adultes qui se racontent, ils le font avec des mots, des construction de phrases d'adultes. Quand c’est Lucien, on a l’impression de relire les meilleures pages du Petit Nicolas de Goscinny. Contrairement aux apparences, ces changements, pour être justes et crédibles, ne sont pas évidents et Rachel Guichard y réussit parfaitement.

    Le plan de Lucien est un petit ouvrage débordant de tendresse et d’optimisme. Quand on s’aime véritablement, on finit toujours par se transformer pour montrer à l’autre, aux autres, la profondeur, la réalité de ce sentiment.

    Émile Cougut

    Le plan de Lucien

    Rachel Guichard

    Éditions du Net. 14€

    WUKALI 02/06/2015

    Courrier des lecteurs : redaction@wukali.com

    Illustration de l’entête :  Balthus (1908-2001) . Les enfants Blanchard (1937).

  • "L'Oreille de Lacan" par Nathalie Georges-Lambrichs dans Lacan Quotidien (n°514, juin 2015)

     

    L’artiste, son modèle, son galeriste et son biographe

    (In)actualité brûlante, la chronique de Nathalie Georges-Lambrichs

    À propos de Catherine Millet, Bernard Dufour, L’Œil du désir, Éditions de la Différence, Paris, 2015 et de Patrice Trigano, L’Oreille de Lacan, Éditions de la Différence, Paris, 2015. 

    Qu’est-ce qu’un artiste ? Un peintre ? Est-ce affaire de savoir-faire, de manière, de style ? Et s’il pouvait s’agir d’une logique ? On se trouve ici à un carrefour. Le focus peut se faire sur qui s’impose au regard global, Jeff Koons et ses structures gonflables géantes renversant les couloirs dans lesquels l’œil des habitués du parc de Versailles se repose, Vanité scintillante de Damien Hirst, sans compter les jeunes artistes qui se lèvent dans l’empire du milieu et ses parages circonvoisins où convergent les faisceaux flagrants des investisseurs clandestins de La Ruée vers l’art1.

    Il peut aussi se faire qu’un parcours force le respect du fait de sa persévérance à frayer une voie propre, intime, inédite. Les furieux que Pierre Lepère a rassemblés pour la littérature, les forcenés, les véhéments ou les frénétiques dont les livres sont des insomnies, ont leurs équivalents en peinture. Mais Bernard Dufour n’est pas non plus tout à fait affin à la catégorie. Et ce n’est pas de catégorie, d’ailleurs, qu’il est ici question, mais de conviction intime.

    Au commencement étaient l’ignorance, le non-savoir faire, la maladresse. Au commencement étaient l’amour et la mort, liés. Puis entre l’amour et l’amour une faille en fusion fondit une surface, une bulle s’y forma, s’enfla, se fragmenta et vint au fur, au jour pas sans la nuit noire comme un four évoquant le temps pariétal où peindre des femmes, plusieurs femmes, et parmi ces femmes, une femme. Martine ainsi prénommée, est la femme du peintre, sa femme prise, perdue et reprise, et de cette femme, le sexe, essentiel, fondamental, jamais définitif, et les yeux, presque équivalents, saisis et lâchés sur des toiles inachevées, comportant des pans de vides et des coulures aléatoires, lambeaux de voiles laissant passer le regard du peintre qui circule dans ses toiles, déposé et dépositaire de leur secret. 

    En quoi la traque impossible par un peintre de son propre regard peut-elle intéresser un autre que lui ? Les impasses en trompe l’œil du se voir se voir n’ont-elles pas été assez condamnées ? C’est qu’il y a des toiles issues d’une solitude que chaque jour a radicalisée toujours plus, solitude nommée, et augmentée de rencontres ou de compagnonnages aussi rares que décisifs. Catherine Millet les indique dans son texte de présentation, très simple et classique, par lequel elle introduit à l’œuvre.

    Chez Trigano à Paris rue des Beaux-Arts on peut voir la dernière exposition pour laquelle ce livre, qui n’est pas un catalogue, a été écrit.

    Je ne peux que dire l’effet, sur moi, de ce que j’y ai vu, à savoir des toiles qui ne m’ont pas paru séduisantes, ni captivantes au premier abord. Des toiles dont j’ai ressenti la violence diffractée entre des compositions déroutantes qui invitent à des lectures, sinon au déchiffrage et des couleurs dysharmoniques, presque criardes, mais seulement parfois, car d’autres toiles, quasi-monochromes, vous font signe, promettant un repos, mais trahissent aussitôt cette promesse, par un détail qui vous coupe à nouveau le souffle.

    C’est que le corps, les corps, leur poids, leur évanescence, leur fuite éperdue, leur capture toujours manquée, et répétée pour cela même, sont la matière du vôtre. Le noir de Soulages se fracture, il ouvre, il débouche, quelque chose hurle, sur une fréquence inaudible. Les voir, ces corps, réduits dans le livre au format de la carte postale les dénature assez pour les rendre regardables, sans trop d’exposition de soi à soi. Mais en présence, c’est bien d’Autre chose qu’il s’agit, et qui vous glace les sangs, et les yeux. Faut-il s’y faire ? Catherine Millet, qui sait de quoi elle parle, vous y invite.

    Et Trigano ? Patrice Trigano vient de publier son troisième roman, qui s’intitule L’Oreille de Lacan. De la vie cet avatar de des Esseintes qu’est l’illustre collectionneur Samuel Rosen, l’auteur-narrateur entend s’inspirer pour écrire le roman que nous lisons. À l’abri des regards, il compose le catalogue de la collection de son héros dont nous saurons beaucoup mais ne verrons rien car « la seule idée de laisser entrer quiconque dans [s]on hôtel

     

    particulier du VIIe arrondissement [lui] déclenche des brûlures d’estomac et des plaques d’urticaire » (p. 44). Infiniment démultiplié, cet ego rêve de l’oreille géante de Lacan (p. 59). Faute de s’être allongé sur le divan de celui qu’il guettait à 20 ans dans la rue de Lille, il est devenu la doublure du Pitre de Weyergans, et fait de sa névrose un objet d’art et l’étendard d’une révolte autoproclamée.

    Ainsi le collectionneur solitaire, « moi, Rosen » (p. 122) accomplit, au fur et à mesure que se déroule son aventure, la quintessence de la névrose, telle que rêver et penser sa vie en sont l’exil lucide et la vérité vraie, tant il appert que « Tout dans [s]a pensée ne fonctionne que par référence à l’art et à la littérature » (p.130). C’est Rosen qui se remémorant le dernier cours de Lacan où il avait vu ce dernier s’enfoncer sans remède dans l’aphasie revient à La Lettre volée et se lance dans le décryptage effréné des Fleurs du mal, soupçonnant des malversations dont il rétablit la vérité avant de disparaître à son tour, faussant compagnie à son biographe, qui le retrouve, lui écrit, et reçoit en retour, sa profession de foi individualiste, étayée sur une solide assertion de Mirbeau ayant trait à la philosophie des moutons (p.152) et quelques autres de son cru. Splendeur et misère. Mais la surprise surgit quand on ne l’attendait plus...

    À l’abri de l’inconsistance qu’il façonne dans la jubilation, Trigano nous a fait traverser le miroir ou le piège de cette existence d’emprunts. Cumulant les joies de l’amateur des sarcasmes les plus délectables et du collectionneur érudit le plus exigeant, à couvert d’avouer ses satisfactions délicates et les impudiques, il méduse les sots, fait des demi-sots ses complices, et de la solitude son arme pour ne garder que cette dernière, et nous en laisser le reflet inutile. Car la solitude est ce vampire auquel chacun résiste par ses propres moyens, et Lacan se révèle à la fin, incarnant la puissance du rêve, la nécessité absolue d’une traversée au-delà du principe de plaisir et la figure en laquelle cristallise l’assomption juste, sans autre garantie que son énonciation.

    1La Ruée vers l’art, documentaire de Danièle Granet et Catherine Lamour, 2013. 

     

  • Présentation de la revue littéraire Livr'Arbitres par son fondateur Patrick Wagner

    Présentation de la Revue littéraire LIVR’ARBITRES

    (sortie du numéro 17 consacré à Dominique de Roux le 12 juin 2015, suivez le lien en cliquant pour avoir l'invitation à cette soirée)

    Couverture de Roux .jpgLa Revue Livr’Arbitres ne revendique rien. Elle ne se propose pas de vous encanailler à peu de frais dans un débat sur la querelle des Anciens et des Modernes. Sur l’existence supposée des néo-hussards et présupposée des Hussards ou l’avènement d’une littérature désinstallée ! Si je prends en compte la dernière rentrée littéraire, comment faire le tri ? Combien de livres édités et déjà oubliés ? Il y a des tendances, des modes et paraphrasant Gustave Thibon, je dirais qu’être à la mode c’est une ambition de feuille morte.

    Non, ce que nous désirons, c’est simplement partager nos bonheurs de lecture, nos coups de cœur et parfois… de gueule. Avec Xavier Eman, mon directeur de la rédaction, nous ne nous connaissons pas de chapelle. Seule ligne directrice le Beau, le Vrai et le Juste. Le journal se construit à chaque numéro. A la fin de chaque trimestre, j’appelle l’ensemble de la rédaction pour savoir où chacun en est, et, quand le nombre de pages me paraît suffisant, nous passons à l’impression. Rien de plus simple. Tout un chacun a des centres d’intérêts différents qui permettent de remplir nos différentes rubriques : portrait, polémique, entretien, nouvelles… On pourra nous qualifier d’amateurs, de gens pas sérieux. Le défaut de notre jeunesse ? Je répondrais que les gens sérieux sont ennuyeux. J’aime trop la vie pour la cloisonner. Ainsi, nous pouvons évoquer dans nos colonnes des sujets aussi divers que le cinéma, Béraud, la Russie ou Les écrivains des vastes horizons à travers un Dossier et un entretien avec Sylvain Tesson. Nous pouvons également apporter un éclairage sur un écrivain oublié de René Bazin à Roger Bésus ; nous entretenir avec Olivier Maulin, Erik L’Homme ou Philippe Alméras. Nous suivons également des auteurs contemporains plus ou moins confidentiels d’Andreï Makine à Eric Faye, de Bernard du Boucheron à Charles Ficat ou encore de Benoit Duteurtre à Thierry Marignac…

     

     

    Un travail salué et encouragé par le critique Pol Vandromme ou l’Académicien Michel Déon qui nous fait le plaisir de nous offrir une nouvelle inédite dans notre dernier n° consacré à Dominique de Roux, où nous rendons également un hommage appuyé à Geneviève Dormann qui nous a récemment quittés.

    Patrick Wagner.